Humeurs territoriales vagabondes…

Publié le

17 mars 2023

Dans le langage politico-technocratique, la « Province » se conjugue depuis plusieurs années au pluriel ; elle est devenue « Territoires » !
Ainsi, sur le territoire national, il y a des territoires dont on se demande s’ils correspondent aux contours des départements. À propos, quid de ceux-ci ? Se sont-ils évanouis au double sens du terme (perdre connaissance, disparaître) !?

Le Père Siffleur

Les conseils départementaux ne prélèvent pas d’impôts mise à part la DMTO (Droit de mutation à titre onéreux, taxe prélevée lors d’une vente immobilière). Ils n’ont quasiment pas d’autonomie financière et dépendent des dotations de l’État qui leur confient sa politique sociale. Souvent, près de la moitié d’un budget départemental est consacrée aux dispositifs d’allocations sociales – le reste aux routes et aux collèges, notamment, sans oublier le tourisme et bien sûr le personnel.

L’épuisement du filon de la décentralisation

Autant dire qu’un Département n’a guère de leviers d’action directe d’autant plus que la loi Notre (2015) lui a retiré des compétences économiques.
Dès lors, le citoyen peut légitimement se poser cette question : avec si peu de moyens, pourquoi garder cet échelon ? Avant la décentralisation (1982), l’État via ses préfets régnait en maître sur les départements et les préfets faisaient la « loi » dans les conseils généraux. La Gauche (quand elle existait, donc…) a voulu conférer du pouvoir aux élus locaux qui devenaient par là maîtres du destin du département – qu’ils sont censés incarner, de par le résultat du scrutin.

Cet humanisme politique (sic) a pu générer de beaux résultats, des réalisations intéressantes ; mais un filon finit par s’épuiser, au fil également des pensées et des générations politiques…

Les Trente Glorieuses de la Lozère 1960-1990

Bon, certes et la Lozère dans tout ça ?
Des années 60 aux années 90, on peut dire qu’elle fut le théâtre d’opérations originales voire innovantes portées par des personnalités (qu’on aime ou pas, peu nous chaut) comme François et Janine Brager, Jacques Blanc, Guy Julien, Jean-Jacques Delmas…
Jacques Blanc fait figure de dinosaure, il a quitté la scène politique pour se consacrer uniquement au monde du handicap. Il est toujours là, considéré ou décrié, respecté ou franchement haï. On lui reproche toujours ce tracé autoroutier (A 75) ignorant la ville de Mende. Un tracé plus central aurait certainement contribué à aérer la Lozère.

Toujours est-il que l’ancien ministre et député avait du pouvoir et défendait la Lozère, pas toute certes, dans le cadre de ces guerres picrocholines…spécifiques à la petite politique.
Or, un Territoire ( !) a besoin d’une incarnation (ou deux, ou trois) pour exister et faire porter sa voix jusqu’aux instances gérant la manne financière publique. Vu l’état général du territoire national malmené depuis une poignée de décennies par les politiques dites publiques (avec son acmé atteinte ces temps-ci), il est difficile d’exister pour un Département comme la Lozère.

Blanche-Neige dans l’impossibilité d’un Prince charmant…

Cantonalement charcuté (par le gouvernement Hollande), stratifié en communautés de communes, en groupements territoriaux (Pôle d’équilibre territorial et rural), animé ( !) par des comités Théodule (bidules de réflexion/prospective/analyse) qui ajoutent à la confusion générale…avec tout ça le département lozérien (comme d’autres de ce type) est à la peine.

Et au milieu coule le Lot et…Mende. Malgré une démographie satisfaisante, d’après les chiffres Insee, la ville-préfecture n’en finit pas de s’endormir comme une Blanche-Neige qui soupçonnerait, dans son coma onirique, l’impossibilité d’un prince charmant.

Vive la Lozère éternelle !

Jean-Philippe ROUX